Forme légère d'après Ruggero Leoncavallo
Musique de Ruggero Leoncavallo (Milan, 1892)
Nouvelle version française à partir du livret du compositeur
Conception et mise en scène Xavier Ricard
adaptation et direction musicale Pierre Roullier & 2e2m
Présentation
- une nouvelle approche de l’opéra mêlant des chanteurs et des comédiens
- un livret en français retraduit et modernisé, redonnant à la trame toute son efficacité
- une transcription musicale pour violon, accordéon et contrebasse rendant à Paillasse la touche populaire souhaitée par Leoncavallo
En 1892, Ruggero Leoncavallo écrit le livret et compose ce qui restera son œuvre la plus connue, I Pagliacci. Deux ans plus tard, l’opéra est traduit en français et représenté au Grand Théâtre de Bordeaux. En 1902, l’œuvre entre au répertoire de l’Opéra de Paris, également dans sa version française : Paillasse devient alors l’un des opéras les plus populaires, ces airs sont fredonnés dans les rues, « Ris donc, Paillasse » sera sur toutes les lèvres.
Paillasse raconte la tragique histoire d’un clown, Canio, directeur d’une troupe de comédiens ambulants. Celui-ci, très amoureux de sa femme Nedda, prévient que si sur scène il peut prendre l’habit du mari trompé, dans la vie «il ne faut pas jouer à ça avec lui»… Le soir, pendant la représentation, Canio, convaincu que sa femme le trompe, se laisse déborder par son rôle : sa réalité rejoint la fiction qu’il est en train de jouer. Il tue «réellement» Nedda et son amant avant de conclure par ces mots « la comédie est finie ».
La tragique histoire de Paillasse reprend donc la trame et tous les airs de l’opéra de Leoncavallo, dans une nouvelle version française, recentrée sur les quatre rôles chantés et un comédien. De manière à rendre plus intime ce drame de la vie conjugale, la partition sera transcrite et confiée à trois musiciens qui seront sur scène.
Distribution
Une création de l’Arcal, cie nationale de théâtre lyrique et musical
conception et mise en scène : Xavier Ricard
adaptation et direction musicale : Pierre Roullier
scénographie et costumes :Jean-Luc Ollivier
lumières : Nicolas Roger
Canio : Damien Bigourdan, ténor
Nedda : Anne Rodier, soprano
Tonio : Pierre Corbel, baryton
Silvio : Jean Fischer, baryton
Beppe : Lionel Monier, comédien
Carlo : André Neri, régisseur
3 musiciens
Pascal Robault, violon et alto - Olivier Moret, contrebasse - Jean-Marc Philippon, accordéon
Disponibilité
Spectacle créé à Châlons-en-Champagne en novembre 2005
2004-2005 : 19 représentations
Châlons - 51 03/11/2005 14h30 La Comète Scène Nationale
Châlons - 51 04/11/2005 20h30 La Comète Scène Nationale
Mâcon - 71 06/11/2005 17h00 Le Théâtre Scène Nationale
Reims - 51 02/12/2005 14h30 Opéra
Reims - 51 03/12/2005 20h30 Opéra
Reims - 51 04/12/2005 14h30 Opéra
Longjumeau - 91 20/01/2006 14h00 Théâtre
Longjumeau - 91 21/01/2006 20h30 Théâtre
Longjumeau - 91 22/01/2006 15h00 Théâtre
Chaumont - 52 29/01/2006 14h30 Le Nouveau Relax
Chaumont - 52 30/01/2006 14h30 Le Nouveau Relax
Langres - 52 05/02/2006 Théatre
Lisieux - 14 10/02/2006 20h00 Théâtre de Lisieux Pays d'Auge
Paris - 75 17/02/2006 20h30 Théâtre Silvia Monfort
Paris - 75 18/02/2006 20h30 Théâtre Silvia Monfort
Paris - 75 21/02/2006 20h30 Théâtre Silvia Monfort
Paris - 75 22/02/2006 20h30 Théâtre Silvia Monfort
Beauvais - 60 28/02/2006 20h30 Théâtre du Beauvaisis
Beauvais - 60 01/03/2006 20h30 Théâtre du Beauvaisis
Production
Arcal en résidence au Grand Théâtre de Reims
Coproduction
La Comète - Scène Nationale de Châlons en Champagne
Théâtre de Sartrouville-CDN
Intention
La tragique Histoire de Paillasse
Ou l’insupportable réalité
« Nous avons l’art pour ne pas mourir de la vérité. » F. Nietzsche.
Lorsqu’en 1892 Ruggero Leoncavallo écrit et compose Paillasse, considéré comme l’œuvre emblématique du mouvement vériste, son projet est de peindre le réel, la vie telle qu’elle est. Son dispositif met en jeu quatre plans :
- l’auteur et son projet (le prologue)
- les comédiens qui jouent sur la scène leur propre vie
- les comédiens jouant leur spectacle (la Commedia) devant un faux public représenté sur scène par les chœurs
- enfin le vrai public dans la salle qui valide et entérine la coexistence de ces plans.
En choisissant de mettre en scène La Tragique histoire de Paillasse il nous a fallu tout d’abord revisiter, à la mesure des conventions théâtrales d’aujourd’hui, le projet de mise en jeu du réel de Leoncavallo. Pour, à notre tour, jouer à ce jeu, avec en prédicat une volonté de proximité, d’empathie entre la scène et la salle, chacun étant à la fois lieu du réel et de la fiction, nous nous sommes donnés de nouvelles cartes :
- Supprimer le chœur, conférant par là au « vrai » public un double rôle : celui qui le fait assister en première partie, dans une convention toute théâtrale, à l’installation des comédiens, puis celui à qui s’adresse réellement la Commedia qui forme la seconde partie.
- Chanter l’œuvre en français pour un rapport direct à la langue sans la béquille du surtitrage.
- Etablir une nouvelle traduction, celle de 1894 paraissant par trop exotique tant le style nous a paru désuet, ampoulé.
- Opter pour une ré-écriture de la partition orchestrale pour une formation réduite à trois musiciens présents sur la scène, formation nous permettant de goûter, par l’épure, au geste mélodique de Leoncavallo sans rien perdre ni du plaisir lyrique ni du contact nécessaire avec le texte.
- Faire exister un œil en soi – sorte de Regard objectif – grâce à une camera manipulée par Beppe, tantôt (ou à la fois) super-spectateur ou super-auteur.
Munis de ces nouvelles cartes, et de quelques autres, nous pouvons commencer à raconter l’histoire de Canio, qui, sous la défroque de Paillasse, passe sa vie à jouer sur scène les cocus et qui, dans la vie passe son temps à se défendre de l’être. Un jour, et c’est à ce jour-là que nous sommes invités à assister, ces deux images acceptables pour lui, car parfaitement distinctes, cessent de l’être : l’image du comédien se superpose violemment à celle de l’homme. La confusion qui en résulte opère un effet de brouillage, un court-circuit. La crise éclate, dévastatrice. Canio ne peut littéralement plus jouer, ne peut plus changer de masques, ne peut plus tricher avec lui-même, la vérité ainsi révélée est intolérable : il ne trouve d’autre issue que dans le meurtre des amants provoquant ainsi sa propre perte.
Double meurtre sur un plateau, meurtre du théâtre dans le théâtre.
À l’instar de Canio, héros au sens tragique du terme, chaque personnage est face à ses propres images, face à cette fissure nécessaire et salvatrice qui existe entre soi et les images qu’on en donne.
Nedda se révolte contre l’image d’elle-même que cet univers d’homme tente de lui imposer : celle de l’icône suscitant tous les désirs. En s’attachant à Silvio, homme de la terre, de la nature chez Leoncavallo, opposé à Canio l’homme du masque, elle espérait trouver cette vérité partagée à laquelle elle aspire.
Silvio, l’amoureux, semble tout entier enfermé dans son image et ne parvient pas vraiment à convaincre Nedda. Il n’échappe pas aux conventions théâtrales et amoureuses, propres à son statut : rendez-vous secrets, serments éternels, duos d’amours alanguis et fuite face au mari trompé.
Tonio, celui que le désir déforme, se débat aussi bien avec ses pulsions qu’avec l’image qu’elles donnent de lui. Lui, l’éternel rejeté.
À chacun ses images, à chacun son image.
À chacun sa capacité à la regarder lorsque celle-ci veut bien se révéler.
Notre Tragique histoire de Paillasse se veut un voyage ludique et émotionnel au cœur de l’idée même de représentation.
Xavier Ricard