Opéra de chambre
Musique de Claudio Monteverdi (Mantoue, 1607)
Texte d'Alessandro Striggio
Mise en scène : Christian Gangneron
Direction musicale : Christopher Jackson ou Françoise Lasserre
Présentation
Interroger le geste fondateur de Monteverdi, c’est poursuivre une réflexion sur la tragédie; c’est aussi pointer comment quelque chose de la théâtralité propre à l’opéra est du côté de l’oratorio.
argument
Prologue
L’allégorie de la Musique présente et justifie la traduction musicale du mythe d’Orphée
Premier acte
C’est une pastorale où alternent chants et danses de bergers, parmi lesquels se trouve Orphée, qui a épousé la nymphe Eurydice.
Deuxième acte
La Messagère vient annoncer à Orphée la mort d’Eurydice ; Orphée décide de descendre aux Enfers pour ramener Eurydice sur la terre, ou pour rester avec elle au séjour des morts.
Troisième acte : Aux Enfers
Orphée ayant affronté Caron, franchit le Styx.
Quatrième acte
Proserpine, charmée par le chant d’Orphée, intercède auprès de son époux Pluton : Eurydice est rendue à Orphée, à la condition toutefois qu’il ne cherchera pas à voir sa femme avant d’être sorti avec elle du royaume des Ombres ; mais Orphée se retourne et Eurydice disparaît à jamais…
Cinquième acte
C’est un épilogue, qui débute par une longue plainte d’Orphée ; au lieu d’être – selon le mythe – lacéré par les Bacchantes, il est enlevé par Apollon vers un éternel séjour dans l’Olympe.
Distribution
Une création de l'Arcal, compagnie de théâtre lyrique et musical
direction musicale : Christopher Jackson (1997-98) ou Françoise Lasserre (2002-03)
mise en scène : Christian Gangneron
décor : Thierry Leproust
costumes : Claude Masson
lumières : Marion Hewlett
maquillages : Elisa Provin
assistant à la mise en scène : Franck Rabilier
répétitrice d'italien : Rita De Letteriis
avec
Orfeo : Hervé Lamy, ténor
La Musica, Euridice : Cyrille Gerstenhaber (1997-98) ou Béatrice Mayo-Felip (2002-03), soprano
La Messaggiera : Claire Brua (1997-98) ou Sylvie Althaparro (2002-03), mezzo-soprano
Speranza : Sylvia Marini (1997-98), mezzo-soprano ou Els Jenssens (2002-03), soprano
Proserpina : Sylvia Marini (1997-98), mezzo-soprano ou Emmanuelle Halimi (2002-03), soprano
Caronte, Plurone : Jean-Claude Sarragosse ou Philippe Roche, baryton-basse
Ninfa : Edwige Parat (1997-98) ou Patricia Gonzales (2002-03), soprano
Appolo, Pastore 4, spirito 3 : Emmanuel Vistorky (1997-98), basse
Pastore 1, Spirito 1 : Pierre Evreux (1997-98), ténor
Pastore 2, Spirito 2, Eco : Raphael Boulay (1997-98), ténor
Pastore 3 : Marc Pontus (1997-98), contre-ténor
Apollo et Spirito 2 : François Roche (2002-03), ténor
Spirito 3 : Emmanuel Vistorky (2002-03), baryton
Pastore 1 : Serge Goubioud (2002-03), ténor
Pastore 2 : Stéphane Lévy (2002-03), contre-ténor
Pastore 3 et Spirito 1 : Philippe Froeliger (2002-03), baryton
Pastore 4 : Bernard Arrieta (2002-03), baryton
Franck Rabilier, comédien
Ensemble vocal Vivete Felici (1997-98)
Chef de chœur : Geoffroy Jourdain
Patricia Gonzales, Violaine Lucas, Edwige Parat,
Caroline Verdier, Marc Pontus, Jean-Paul Bonneval, Raphaël Boulay,
Pierre Evreux, Christophe Olive, Emmanuel Vistorky
Ensemble Instrumental (1997-98)
Xavier-Julien Laférrière, Judith Depoutot, Jean-Paul Burgos (violons) ; Michèle Sauvé, Annie Coville, Françoise Rojat (altos) ; Christine Plubeau (viole et lirone) ; Julie Mondor (violoncelle) ; Christine Payeux (violone) ; Françoise Johannel (harpe) ; Marc Wolf, Pascale Boquet, Charles-Edouard Fantin (luth et théorbe) ; Christopher Jackson, Emmanuelle Haïm, Freddy Eichelberger (clavecins, orgue, régale) ; Stéphane Legée, Ludovic Milhet, Jean-marie Bonche, Pascal Gonsalez, Dominique Lortie (saqueboutes).
Ensemble Akadêmia (2002-03)
Sofie Vicente, Sophie Patey (sopranos) ; Pascal Richardin, Benoît Damant (ténors) ; Emmanuel Bouquey (basse)
Musiciens (2002-03)
Veronika Skuplik, Cosimo Stawiarski (violons) ; Sylvia Abramowicz ou Mathieu Lusson (violes) ; Christine Payeux (viole et violone) ; Yuca Saïto (violes) ; Imke David (viole et lirone) ; Gebhard David, Frithjof Smith (cornets et flûtes) ; Gilles Rapin ou Jean-François Madeuf (trompette) ; Christiane Bopp, Fabien Dornic, Fabien Cherrier, Simen van Mechelen ou Jacques Henry, Jean-Jacques Herbin (trombone) ; Nanja Breedjik (harpe) ; Marco Horvat (théorbe et guitare) ; Massimo Moscardo (théorbe et teorbino) ; Freddy Eichelberger, Emmanuel Mandrin (clavecin et orgue)
Disponibilité
Spectacle créé à La Ferme du Buisson (Marne la Vallée) en janvier 1998
1997-98 : 23 représentations
(Vichy - Besançon - Brest - Saint Brieuc - Rennes - Sceaux - Orléans - Saint Etienne - Clamart - Saint Quentin en Yvelines - Amiens - Villeparisis - La Rochelle - Massy - Sartrouville - Chelles - Le Perreux)
2002-2003 : 6 représentations
Reims - 51 le 08/11/2002 à 20h30 à l'Opéra
Reims - 51 le 10/11/2002 à 14h30 à l'Opéra
Metz - 57 le 15/11/2002 à 20h30 à l'Opéra-Théâtre
Metz - 57 le 17/11/2002 à 15h00 à l'Opéra-Théâtre
Tours - 37 le 11/01/2003 à 20h00 au Grand Théâtre
Tours - 37 le 12/01/2003 à 15h00 au Grand Théâtre
Production
Arcal
Coproduction
Théâtre de St-Quentin en Yvelines
Le Carré Saint-Vincent d’Orléans
La Ferme du Buisson Marne la Vallée
Les Gémeaux
La Coursive de la Rochelle
Opéra-Théâtre de Besançon
Soutien
Ile de France Opéra et Ballet
Intention
L'ardeur et l'oubli
A la césure de la Renaissance et de l'âge baroque, L'Orfeo mêle joyeusement les styles, utilise toutes les ressources musicales anciennes et nouvelles, profanes et religieuses dans sa recherche fervente d'un genre neuf, où la musique, comme schème formel, va devenir dépositaire d'une dimension théâtrale, ici, tout à la fois narrative et méditative. La disparate y est assumée comme hommage aux multiples origines et comme déclinaison des possibilités expressives, des pistes à explorer : prix et témoignage d'une aventure artistique. Pour se rendre sensible à l'intensité et à l'audace du geste monteverdien, il importe, en représentant L'Orfeo aujourd'hui, de travailler à ne pas gommer les disparités, les hiatus, au nom de ce que le drame lyrique est devenu, mais à l'inverse de mettre en lumière et d'aviver les contradictions, les décalages.
Une contrainte formelle fonde l'entreprise dont Monteverdi entend prendre la mesure : comment christianiser le mythe grec, que toute une tradition humaniste a tenté de s'approprier ? Question qui occupe Monteverdi jusqu'au bout comme en témoignent les deux fins : dans le livret imprimé de la première représentation de 1607, Orphée fuyait les Bacchantes venues pour le tuer ; dans la partition éditée par Monteverdi lui-même en 1609, c'est Apollon qui vient chercher son fils pour une "ascension" autrement plus "catholique" que la Bacchanale qui concluait la première version. Question centrale pour le compositeur et donc question d'espace pour la représentation.
Tributaire des Florentins, Monteverdi n'évacue pas la Pastorale - forme avant lui obligée pour dire la légende d'Orphée - mais en la resituant dans une structure narrative d'oratorio et de tragédie, il porte sur elle une regard tendrement incrédule. Une distance est prise, celle du dramaturge qui met désormais tout à profit pour ménager des effets de sens.
Au dire de Monteverdi, L'Orfeo le portait à une "juste prière" : cette inspiration se retrouve notamment dans la dimension oratorio déjà présente dans le livret de Striggio et que la mise-en-musique accentue fortement. L'importance du chœur - tour à tour narrateur et acteur - , est ici en jeu et la variété des écritures chorales qui mettent en valeur la diversité de ses fonctions dramaturgiques. On sent là en gestation l'univers de Carissimi.
Cette prise de distance que s'autorise Monteverdi dans le traitement du sujet et du texte, dans le même temps qu'elle élimine de sa musique tout souci décoratif, colore le récit d'ironie : en témoigne le traitement des personnages et des situations depuis le prologue jusqu'au chœur final, mais aussi la confrontation centrale Orfeo-Caronte ou la dérision de l'écho du cinquième acte, sans parler de la scène entre Proserpine et Pluton... La palette de l'ironie monteverdienne est d'une grande richesse, tout entière au service de ce qui en apparaît la forme ultime et essentielle, l'ironie tragique - pour raconter l'histoire d'un homme qui a de la peine à croire à son bonheur présent tant pèse sur lui un passé de tourments ; s'abandonne-t-il enfin à la joie que l'horreur survient, et quand de haute lutte, il croit avoir reconquis le bonheur en allé, la griserie de sa victoire le lui fait reperdre. Tout au long du récit de cette manière de Passion, le narrateur multiple nous aura sans cesse mis en état d'alerte, témoin cet "esprit infernal" lorsqu'il fait mine de poser la question : "de ces cavernes horribles, Orphée sortira-t-il son épouse ? Aura-t-il assez de jugement pour dompter sa juvénile ardeur et ne pas oublier les ordres sévères (de Pluton) ?"- prenant bien soin de faire se retrouver à la rime desio et oblio. Si les Florentins, non sans naïveté, nourrissaient l'espoir de retrouver la forme de la tragédie grecque, Monteverdi avec L'Orfeo en réaffirme - avec quelle force - l'esprit. " Il y a tragédie, selon J.P. Vernant et P. Vidal-Naquet, quand par la simulation d'un système cohérent d'actions suivies conduisant à la catastrophe, l'existence humaine accède à la conscience, tout à la fois exaltée et lucide, aussi bien de son irremplaçable prix que de son extrême vanité".
Au fond, la question que se pose et nous pose Orphée - quelle place et quel sens donner au passé dans le présent d'une vie à venir, c'est la question même qui occupe Monteverdi sur le plan esthétique dans L'Orfeo. Il est bien le premier vrai dramaturge musical, parce qu'il a su, dès L'Orfeo, sur l'ensemble de la pièce comme dans la moindre scène, faire son sujet de la forme même.
Christian Gangneron
Dates
Ressources
Ateliers et rencontres autour du spectacle
Dès l'origine, l'Arcal a choisi, en accompagnement à ses productions d'opéras, de mener une véritable politique d'action culturelle dans le domaine lyrique. Dès que la décision de créer un opéra est prise, l'équipe de l'Arcal réfléchit avec le metteur en scène, le compositeur, les artistes et les techniciens au contenu des ateliers et des actions qui seront mis en place autour du spectacle. Pensés comme complémentaires, les angles d'approche sont très divers.- Autour de L’Orfeo Présentation historique de l’œuvre : la naissance de l’opéra à Florence en 1600 lors du mariage d’Henri IV, la création de L’Orfeo à Mantou en 1607, l’importance de la poésie dans la société de l’époque, etc.